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La naissance d’une chaussure de tennis

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De tout l’équipement d’un joueur, sa paire de chaussures est sans doute l’objet le plus complexe. Pas moins de 150 opérations sont nécessaires pour en fabriquer une !  Pour Tennis Addict, les équipementiers décrivent pas à pas son parcours, de l’idée aux rayons des magasins.

JUSQU’À TROIS ANS DE CONCEPTION 

Si pour tout tennisman la raquette reste le produit phare, il oublie souvent qu’un concentré de technologies se trouve à ses pieds. Au total, six mois à trois ans de travail et pas moins de 150 opérations de fabrication sont nécessaires pour créer une seule paire de tennis. 

Première étape : synthèse de besoins,
designs et technologies

Premier maillon de la chaîne, le chef de produit doit définir le concept, qui intègrera trois dimensions :

  • une réponse efficace aux contraintes techniques;
  • un design en adéquation avec l’identité de la marque;
  • l’intégration de technologies innovantes qui démontre le savoir-faire et la différenciation.

1.Les contraintes techniques

” Dans l’histoire du tennis, le premier besoin identifié a longtemps été la résistance, explique Guillaume Girard, le chef de produit chaussure de tennis chez Artengo. Imaginez, par exemple, la résistance à l’abrasion et à la thermo-abrasion nécessaire dans des conditions extrêmes comme en Australie,  où la température au contact du sol dépasse parfois 100°ー ! ”  

S’y ajoutent des contraintes bien spécifiques à la pratique du tennis :

  • la stabilité est primordiale dans un sport où une grande partie des déplacements sont latéraux;
  • la tige (partie haute de la chaussure) est soumise à des déformations importantes, et doit être renforcée à des endroits bien spécifiques, comme sur l’avant-pied interne;
  • l’amorti  prend tout son sens quand on sait que c’est un sport pratiqué essentiellement sur des surfaces “dures”;
  • le dynamisme de la chaussure (sa capacité à favoriser la relance) doit être optimisé. C’est d’ailleurs le critère n°ー1 chez Babolat. ” Il faut être capable d’aller le plus vite possible vers la balle, surtout après une reprise d’appui, sachant que 80% des déplacements du tennis sont latéraux ou en diagonale “, explique Cécile Gindre, chef de produit chaussure de la marque française. 
  • Enfin, la légèreté est le Graal poursuivi par tous les concepteurs, mais à condition de ne pas sacrifier les autres critères. 

2. Le design

Le design est souvent influencé par la culture “interne”. Ainsi, adidas va marqueter son concept d’ultra-légèreté “adizero” de manière transversale aux différents sports-phares de la marque. Chez Asics, l’ADN du running est omniprésent dans la gamme Gel Solution : avec un poids de 305g pour un 421/2, cette chaussure destinée aux attaquants reprend les technologies du running, mais aussi ses codes : matériaux pour la tige légers et respirants, couleurs vives (rose, vert pomme),…

Le design poursuit enfin un autre objectif, plus commercial celui-là : il doit permettre, en modifiant les couleurs de quelques éléments, de donner un sentiment de nouveauté permanent. Nike lance ainsi pas moins de quatre collections par an, avec souvent plusieurs coloris par collection. Pourtant, si on y regarde de près, les modèles sont intrinsèquement les mêmes pendant 2 à 3 ans.

3.Les technologies innovantes

Parmi les révolutions récentes, la disparition du cuir. La tige est désormais faite d’un mélange de matériaux synthétiques (polyuréthane, mesh…), plus légers, résistants et dotés d’une meilleure respirabilité. Et surtout  plus faciles et moins chers à industrialiser ! Car le cuir, matériau vivant et donc plein d’imperfections,  nécessite l’intervention humaine d’un “coupeur” qui doit positionner les emporte-pièces autour de ces défauts. Les matériaux synthétiques permettent aussi des variations de texture et de couleurs à l’infini, qui correspondent mieux aux attentes des designers et des consommateurs. Citons également l’arrivée de l’EVA, un copolymère qui, couplé à une semelle d’usure en caoutchouc, constitue l’ossature des chaussures actuelles. Il confère légèreté à la couche de confort et a remplacé le Polyuréthane double densité des années 80, plus lourd et trop peu résistant à la thermo-abrasion.

Deuxième étape : Cahier des charges et prototypes

La formule concoctée sera soumise à un designer et à un modeleur, qui vont devoir transformer le briefing en réalité technique. En s’appuyant sur un élément essentiel : la forme intérieure de la chaussure. Autrement dit, tout ce qui fait que dès qu’on met le pied dedans, on est bien.  Un savoir-faire qui vaut de l’or ! Asics a plutôt choisi de construire son succès dans le tennis sur cet aspect : un confort d’accueil exceptionnel quand le consommateur met son pied dans la chaussure en magasin. Le cahier des charges technique réalisé, reste à conjuguer des critères pas toujours compatibles . “Ce que l’on gagne sur l’un, on le perd généralement sur l’autre “, résume Guillaume Girard. Pour sa TS 900, Artengo a par exemple voulu  favoriser maintien et résistance, tout en ménageant au maximum la  souplesse du déroulé du pied. Un premier prototype doit d’abord servir à étudier les questions techniques et de coût avec les sous-traitants.  Quatre à six mois sont nécessaires pour réaliser un prototype fonctionnel. Une batterie de tests s’organise parallèlement avec des joueurs pro et amateurs. Artengo fait ainsi appel à l’académie de tennis de Valence pour son haut de gamme ou à des amateurs pour ses chaussures ” occasionnelles “, comme celles destinées aux enfants qui jouent une heure le mercredi. 

Troisième étape : L’industrialisation, made in Asia 

Sans surprise, la production est essentiellement assurée en Asie (Chine, Vietnam, Indonésie…). Pour des raisons de coût, mais aussi parce qu’on y trouve les process les plus performants. La fabrication démarre environ cinq mois avant la mise sur le marché. Et dure un à deux mois, avant de revenir par bateau. La fabrication commence par la tige, d”t les différentes parties sont cousues, avant d’être assemblées par collage à la semelle. Celle-ci se compose d’une triple couche : une semelle extérieure à base de caoutchouc, une semelle de confort souvent en EVA. Son rôle ? Assurer confort, amorti et dynamisme. Une troisième semelle, dite ” de propreté “, est simplement posée à l’intérieur.  

Chaque niveau est source constante d’innovations. Pour booster l’adhérence et la résistance à l’abrasion de sa Propulse, Babolat s’est notamment associé à Michelin pour créer une semelle à base d’une formule caoutchouc ainsi qu’une ”  sculpture ” inédites. Pour favoriser l’amorti, les marques rivalisent aussi d’ingéniosité. Yonex n’a pas hésité à diffuser une vidéo complètement improbable : lâché à 6 mètres de hauteur sur un coussin équipé de son système Power Cushion, un œuf rebondit (à 4 mètres) sans dommage… ! 

 

Les défis technologiques de demain

Tout d’abord, la révolution numérique est en-cours : le système de puce miCoach Speed Cell d’adidas, vous donne aujourd’hui vos statistiques de vitesse de course moyenne et maximale, la distance parcourue… Dans le même esprit Nike a dévoilé une chaussure équipée de capteurs indiquant la vitesse, mais aussi le nombre de pas par seconde, ou la hauteur à laquelle vous sautez. Données qui peuvent être recueillies via un iPhone connecté en bluetooth ! Et bien entendu à terme partagées sur Facebook ! 

Mais les fabricants travaillent aussi sur des matériaux nouveaux de semelage, qui pourraient remplacer l’EVA et offrir, à poids égal, une stabilité des performances plus importante (par exemple, l’amorti de l’EVA, sous la répétition des chocs, se dégrade assez rapidement). 

Enfin, le rêve ultime pour tout fabricant serait d’inventer la chaussure à taille unique, qui s’adapterait à toutes les formes de pieds et à toutes les exigences morphologiques des différentes populations. C’est encore aujourd’hui une utopie, mais les chercheurs cherchent…

Le test consommateur

Arrivé dans les rayons des magasins, un modèle possède une durée de vie commerciale de deux ans environ. Malgré un process conçu pour prévenir toute ” erreur “, l’essai n’est cependant pas toujours transformé. Sous la pression du timing, certaines étapes peuvent être très raccourcies. Et notamment la phase d’essais au porter à grande échelle, car elle intervient après la réalisation des outils industriels (moules et emporte-pièces), et juste avant la fabrication industrielle. Il est souvent déjà trop tard pour faire marche-arrière, si l’on veut respecter les délais de mise sur le marché, quitte à “prendre des risques”.

C’est donc à ce stade que les tests-consommateurs prennent tout leur sens : donner au pratiquant une grille de lecture la plus objective possible et la plus complète, en organisant des essais au porter et en laboratoire quelques mois avant la mise sur le marché des produits. Comme vous le savez, votre magazine TennisAddict s’est d’ailleurs spécialisé dans ces tests-consommateurs. Les produits sont récupérés auprès des marques juste après le lancement des premières productions en Asie. Les essais durent plusieurs mois, pendant que la production se termine et que les chaussures voyagent en bateau vers les rayons des distributeurs. La boucle est ainsi bouclée ! 

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PROTOCOLE DES ESSAIS TENNISADDICT

1. Phases d’essais au porter

Certains critères, comme le confort, sont le fruit de la perception du testeur influencée par la combinaison de nombreux  facteurs, comme la forme de son pied (large, universel ou fin), la qualité perçue de maintien et de finition de la chaussure, l’adaptation à une nouvelle chaussure par rapport  à son modèle habituel,… Les testeurs sont donc invités à noter différents critères (voir tableau page 25).

La subjectivité est limitée par le nombre de tests réalisés : au minimum 30 testeurs différents par modèle. La note finale exprime une moyenne des notes données par les 30 testeurs.

PERFORMANCE SUR DUR – Ce test mesure la performance perçue par nos testeurs sur les 3 critères suivants :

1. Facilité à changer brusquement la direction de leur course, en cas, par exemple, de contrepieds ou d’amortis.

2. Solidarité entre le pied et la chaussure sur les appuis marqués et capacité de se relancer dynamiquement.

3. Qualité de l’adhérence sur surface dure, sans patiner sur les premiers appuis et sans se bloquer de manière intempestive.

CONFORT EN JOUANT – Les  chaussures  ne  peuvent  être  essayées qu’en magasin par le pratiquant qui perçoit alors le chaussant d’accueil. Le confort en jouant peut être très différent quand on met la chaussure en situation dynamique (appuis marqués, course, sauts,…). Ce test mesure la qualité du confort perçu par nos testeurs en jouant.

MAINTIEN DE LA CHEVILLE PERCU – Ce test évalue la stabilité de la chaussure, perçue par nos testeurs, lors des phases de jeu qui pourraient provoquer un basculement de la cheville (glissades, reprises d’appuis, changements de direction,…).

DURABILITE – A la fin des essais, nos équipes inspectent la chaussure au niveau de la tige et de la semelle pour détecter d’éventuelles zones de fragilité et notent la qualité de résistance de la chaussure.

2. Essais en laboratoire – Voir ci-contre
(CTC Lyon – Laboratoire d’essais physico–mécaniques)

Certains paramètres, comme l’amorti au talon ou la restitution d’énergie de l’avant pied (dynamisme) ne sont pas perceptibles objectivement par les testeurs pendant les essais au porter. TennisAddict s’appuie sur l’expertise du laboratoire CTC à Lyon pour mesurer ces valeurs scientifiquement.

3. Un devoir d’objectivité

Cette question se pose légitimement, car les marques dont les produits sont testés, sont aussi potentiellement les annonceurs publicitaires du magazine. « Si nos lecteurs ont l’impression que les résultats sont achetés, il n’accorderont plus aucun crédit à nos tests. TennisAddict perdrait alors son lectorat, et donc ses annonceurs. Ce serait 
suicidaire », indique Jérôme Fechter, responsable des tests chez TennisAddict. « Mais c’est également pour cette raison que nous nous appuyons sur l’expertise d’un laboratoire indépendant comme le CTC ».

Essai n°1

AMORTI AU TALON – COEFFICIENT DE TRANSFERT

Lors de prises d’appuis violentes au sol, un important pic d’impact est transmis au corps humain. Afin d’en limiter les conséquences, il est nécessaire que la chaussure, via la semelle, puisse amortir partiellement cet impact. L’essai du coefficient de transfert mesure cet amortissement.

Essai n°2

STABILITE – COUPLE EN TORSION

Afin d’assurer un bon maintien du pied et de la cheville, il est nécessaire que l’avant-pied et l’emboîtage soient suffisamment solidaires, sans pour autant bloquer le pied. C’est ce que mesure l’essai du couple en torsion. 

Essai n°3

DYNAMISME – RESTITUTION D’ENERGIE DE L’AVANT-PIED

Il est très important au tennis de disposer d’un dynamisme sur l’avant-pied pour favoriser le changement d’appui et/ou la relance latérale. Ce potentiel de relance est mesuré par le test de la restitution d’énergie de l’avant-pied.