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William Maringer : “une terre battue, c’est une vie”

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“On fait pas ce métier par hasard” : il est tombé dedans quand il était petit, William Maringer a repris Cowland, la société de son papa, depuis une vingtaine d’années. Cowland ne fait que de la terre battue traditionnelle française et oeuvre dans plusieurs clubs européens. Rencontre.

TennisAddict : Expliquez-nous Cowland, ses origines, son savoir-faire…

William Maringer : C’est mon papa qui s’occupait de ça, qui m’a transmis ce savoir-faire et j’ai très vite été passionné par la terre. Cowland ne fait que de la terre battue traditionnelle française, on est spécialisés dans la terre type Roland-Garros. C’est ma grande passion et c’est pour moi la seule et unique surface qui nous permet de glisser et de jouer au tennis. Mon papa le faisait très bien, à l’époque, c’était un des rares à maitriser la technique. La terre c’était un privilège, réservée aux clubs un peu riches.

TA : D’où vient la terre battue ?

W.M. : Cowland, c’est du local, mais on exporte ce savoir-faire, cette spécificité, que le monde nous envie avec l’incroyable vitrine qu’est Roland-Garros. Il y a deux carrières dans le nord de Paris, dans l’Oise, d’où est extrait le calcaire. Donc quel que soit l’endroit dans le monde, le calcaire vient de l’Oise et j’ai donc la chance d’exporter ça  en Allemagne, en Suisse et au Luxembourg.

TA : Combien y a-t-il de terres battues traditionnelles en France ?

W.M. : En vraies terres, finalement on n’est peu fournis, il y a environ 13% de vraies terres battues en France, soit environ entre 4 et 5000 terrains , alors que l’Allemagne c’est 95% ! L’Espagne, l’Italie ou encore l’Argentine jouent également beaucoup sur terre.

TA : De quoi est composé un court en terre battue ?

W.M. : Une terre battue, c’est 2mm de brique pilée en surface puis il y a une couche de 6 à 8cm de calcaire, dessous une couche de 8 à 10cm de maâhefer (résidu de brûleries qui contient l’eau pour réhydrater par capillarité la terre), sous ce mâchefer, il y a une couche de petits cailloux et de gros cailloux en-dessous pour l’évacuation et le drainage.

TA : Quels sont les avantages d’une terre battue ?

W.M. : L’avantage de la terre c’est que chaque année, on a un terrain neuf. Même avec une vieille terre, on arrivera toujours à quelque chose d’acceptable, comparé à une résine par exemple qui engendre de gros budgets pour rétablir un terrain complet. Une terre c’est une vie, au minimum ! On a déjà travaillé sur des terrains qui avaient 70 ans !

TA : Combien de temps prend la réfection d’un terrain en terre battue ?

W.M. : Avec une équipe avertie, bien équipée, il faut compter 2 à 3 jours de réfection. Il y a beaucoup de travail : on commence par un nettoyage général, puis le décompactage de cette chape de jeu, on va retourner le terrain. Ensuite, on reprend les niveaux, la planimétrie et on commence le roulage au rouleau double billes. On alterne rouleau et rabot pour que la planimétrie soit parfaite, puis on intègre le rouge, la brique pilée. On termine les lignes à la peinture comme à Roland-Garros. Pour un terrain intérieur, il faut compter 3 fois plus de temps car le décompactage est plus long. En revanche, les courts intérieurs, on peut les réfectionner tous les deux ans puisque ça ne gèle pas.

TA : Qu’est-ce qu’une bonne terre selon vous ?

W.M. : Pour moi, toutes les terres sont bonnes. Aujourd’hui, il y a beaucoup de types de terre. Chaque région a des particularités, des terres différentes. Mais ces glissades, l’amorti, on l’a sur toutes les terres. Une bonne terre c’est un terrain ou on pourra jouer toute sa vie et on se fera jamais mal. La couleur, l’aspect : ça reste pour moi la seule surface de jeu du tennis !

TA : Quel est le bon entretien d’une terre ?

W.M. : 70% de l’entretien se fait par les joueurs eux-mêmes : passage de la traine sur tout le terrain, balayer les lignes et l’arroser. Ce sont des choses assez simples. Pour les 30% restants, l’entretien complet est fait par les sociétés : reprendre la planimétrie etc…

TA : On a plus tendance à faire des terres battues rapides aujourd’hui ou bien ?

W.M. : Effectivement, aujourd’hui on livre des terrains qui sont plus rapides qu’avant. Il y a quelques années, mon père mettait plus de brique pilée, donc les terres étaient plus lentes (il faut savoir que plus il y a de sable, plus la balle va être freinée et va s’écraser). Aujourd’hui, on a réduit considérablement l’épaisseur du calcaire, donc le court sèche plus vite et est plus rapide… presque aussi rapide que sur un dur ! Par contre, elle procure une glissade et un déplacement uniques.

TA : La tendance en ce moment, c’est la terre artificielle. Qu’en pensez-vous ?

W.M. : C’est bien car de vieux bétons poreux ou des synthétiques peuvent retrouver une nouvelle jeunesse. Mais moi, je n’ai pas envie de ça, je reste à ma terre traditionnelle ! Je suis dans un groupement de constructeurs, le GCTB (Groupement de Constructeurs de Terres Battues), on est plus très nombreux à faire de la terre et à maitriser les techniques alors je faire perdurer cela. Je suis également dans une association de développement de la terre battue, l’ADTB (Association de Développement de la Terre Battue), détenue par Bruno Renoux, pour la valorisation de la terre. Le reste, je le laisse aux autres !

TA : Enfin, une petite explication de ce nom “Cowland” ? 

W.M. : Quelqu’un a eu un succès fou avec un crocodile, pourquoi pas une vache ? (rires). J’ai toujours aimé les vaches, toujours eu une attirance pour le noir et blanc. Et puis il y a des coups spécifiques attribués comme “vaches” sur terre battue, par rapport au jeu : des amortis, bref on ne joue pas sur terre battue comme on jouerait sur une résine !

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