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Interview : Jean-Jacques Poupon, “maître cordeur”

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Quelles sont vos activités au-jourd’hui ?

Je suis offciellement retraité depuis 7 ans aprés avoir passé 21 ans chez Babolat. Même si via Babolat, il m’arrive encore de préparer des raquettes pour Rafael Nadal. J’ai désormais ma société Tennis El’Dorado, dans mon atelier de Concarneau, je prépare et corde encore des raquettes pour des joueurs qui me le demandent notamment Gilles Simon, Richard Gasquet ou Lucas Pouille. Enfin depuis 1991, la FFT m’emploie sur toutes les rencontres de Coupe Davis, de Fed Cup ou à l’occasion de Jeux Olympiques.

Durant toutes ces années sur le circuit, vous avez travaillé pour de nombreux joueurs, mais vous avez une relation spéciale avec Nadal…

Forcément car Rafael est quelqu’un d’extraordinairement attachant, fidèle. Tout comme son oncle Toni d’ailleurs. Pendant longtemps, j’allais chez eux deux fois par an. En 2011, quand Rafa a remporté le point décisif face à Jo (Tsonga), en demi-finale de Coupe Davis, il est d’abord venu me donner une accolade.

Vous avez d’autres forts souvenirs avec les Bleus ?

Oui une autre rencontre de Coupe Davis m’a particulièrement marqué. Il s’agit de la victoire en Australie de 2001. Nous avions été battus chez nous par l’Australie en 1999. On l’avait très mal vécu. Puis deux ans plus tard, on s’impose chez eux. J’ai été impressionné par le public australien qui avait été extraordinaire.

Car malgré la défaite, les spectateurs étaient restés dans le stade. C’était un moment très émouvant de voir, à l’autre bout de la plantèe, ce public d’une très grande correction. C’était aussi l’époque où la Coupe Davis attirait les meilleurs joueurs puisque Lleyton Hewitt était n°ー1 mondial. Et diffcile de ne pas évoquer la victoire à Lyon en 1991 contre les Etats-Unis de Sampras et Agassi. Un grand moment !

Comment expliquez-vous votre longévité avec les équipes de Coupe Davis ou de Fed Cup ?

Peut-être par le respect des joueurs et des joueuses, et par le fait de savoir rester à ma place. Je ne suis pas kineé, pas préparateur physique. Mais peut-être que ma personnalité et ma présence sont rassurantes. On peut compter sur moi. Et puis Yannick Noah ou Ameélie Mauresmo, je les ai connus joueurs avant qu’ils ne deviennent capitaines. Il y a donc probablement une con ance réciproque.

Pourquoi continuez-vous ?

J’ai 63 ans, deux enfants et parfois cela me traverse l’esprit d’arrêter, pour aller pêcher. Mais j’ai la chance de vivre de ma passion et les gens en place veulent que je reste. Voir aussi la nouvelle génération de joueurs français réussir me fait très plaisir. D’autant que lors de la campagne 2017 victorieuse en Coupe Davis, nous avons encore vécu de belles émotions. Et puis, je suis sensible à cette dimension collective du tennis : des joueurs ou des joueuses qui ont l’habitude d’évoluer sur le circuit, se retrouvent pour former une équipe, pour jouer pour leur pays, j’adore ça !

Vous répétez souvent que vous n’êtes pas le meilleur cordeur ou préparateur de raquettes. Pour quelle raison ?

Parce qu’il faut rester simple et tout simplement parce que des jeunes cordent plus vite que moi. Le mot “meilleur” ne veut rien dire. J’ai beaucoup travaillé et expérimenté de choses lors du passage des cadres bois au cadre en graphite, j’ai form des gens. Mais le matériel évolue constamment. Donc on apprend en permanence, avec l’expérience. C’est comme le mécano qui travaille pour Sébastien Loeb, ils vont améliorer les choses à deux, en s’adaptant aux demandes du pilote. Moi aussi avec les joueurs ou les joueuses, je dois tenir compte de leurs retours, de leurs sensations. Et rester conscient que le matériel n’est qu’un des facteurs qui rend possible la performance.

Paradoxalement vous ne jouez plus au tennis ?

Non j’ai été 15/5 mais aujourd’hui, mon regard sur ce sport est surtout technique, donc forcément déformé. Je regarde sans cesse ce qu’on peut améliorer dans le matériel. Ce qui me permet même de “prendre des risques” en Coupe Davis et en Fed Cup car tout le monde me fait confiance : par exemple j’anticipe sur l’humidité de la salle ou le fait qu’un joueur retienne un peu son bras en début de partie, pour adapter la tension du cordage.