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À la une : Simona Halep, l’âge de raison

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BIEN QUE BATTUE DÈS LE 1ER TOUR DE L’US OPEN, SIMONA HALEP, QUI A REMPORTÉ SON 1ER TITRE EN GRAND CHELEM À ROLAND-GARROS APRÈS 3 FINALES PERDUES, RESTE LA JOUEUSE LA PLUS RÉGULIÈRE DU CIRCUIT. LA ROUMAINE, SOLIDE N°1 MONDIALE, A FRANCHI DE NOMBREUX PALIERS CES 18 DERNIERS MOIS NOTAMMENT SUR LE PLAN MENTAL.

 

FICHE D’IDENTITÉ 

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• 26 ans, née le 27 septembre 199 à Constan?a (Roumanie)

• 1,68m, 60kg

• Droitière, revers à deux mains 

• 18 titres en simple

• Gains en carrière : 27 millions $

• Raquette : Wilson Burn 100 Countervail

• Cordage : Luxilon ALU Power 

• Équipementier chauss./textile: Nike 

ENFANCE

Native de Constan?a, sur les rives occidentales de la mer Noire, Simona Halep est la fille de Stere, un joueur de football amateur, propriétaire d’une usine de produits laitiers, Tania sa maman ne travaillant pas. Elle débute le tennis très tôt, à l’âge de quatre ans pour imiter son frère aîné Nicolae, s’entraîne quotidiennement à six ans et décide de devenir professionnelle dès 14 ans. Pour y parvenir, elle part pour Bucarest à 16 ans.

PREMIERS COUPS D’ÉCLAT

Dès 2008, elle remporte Roland-Garros juniors, dominant sa compatriote Elena Bogdan en finale. En 2009, à 17 ans, elle décide de subir une réduction mammaire : «À l’époque, je l’ai fait pour le tennis. Peut-être que ça m’a permis d’arriver aujourd’hui à la première place mondiale. Je me sens beaucoup mieux, peu importe ce que pensent les gens. Ma poitrine me gênait, surtout au service. Elle était si lourde que j’avais souvent des douleurs dans le dos». Aujourd’hui, Simona ne veut plus en entendre parler. Le premier déclic sur le circuit principal a lieu en mars 2013 à Rome, la Roumaine sort des «qualifs» puis s’offre Radwanska (n°4 mondiale), Vinci (15e), Kuznetsova (37e WTA) et Jelena Jankovic (18e), avant de chuter en demies devant Serena Williams. Cette saison-là, Halep remporte six titres, se hissant à la 11e place en fin d’année. La machine est lancée.

TROIS FINALES DE GRAND CHELEM, TROIS DÉFAITES 

Ces trois «échecs» ont donné à Halep la réputation d’une joueuse qui flanche dans le «money time». Une étiquette pas forcément justifiée si l’on analyse le déroulement de ces trois rencontres. Lors de Roland-Garros 2014, elle cède face à Maria Sharapova qui compte déjà quatre tournois du Grand Chelem à son actif (6-4, 6-7, 6-4 en 3h02), après avoir tout donné. Plus expérimentée, la Russe explique alors qu’il s’agit «de la finale la plus difficile » de sa carrière. Halep, qui a réussi le debreak au 3e set, est passée en 12 mois de la 57e à la 3e place mondiale.

En 2017, toujours à Roland-Garros, la Roumaine part cette fois grande favorite. Menant 6/4, 3/0 devant Jelena Ostapenko, elle finit par s’incliner sur le passage de l’ouragan letton (4-6, 6-4, 6-3). Sans doute un peu trop passive, Halep a également subi la puissance et l’insouciance de son adversaire (20 ans, aucun titre sur le circuit) qui s’est mise à tout lâcher… et à tout rentrer, réussissant 54 points gagnants durant la partie.

En début d’année 2018 à l’Open d’Australie, c’est la Roumaine qui a failli réussir un incroyable come-back : menée un set à zéro, au bord des crampes (elle sera même hospitalisée pour déshydratation après le match), Halep a cru renverser la vapeur contre Caroline Wozniacki. Mais la Danoise, au bénéfice d’une défense héroïque dans la troisième manche, garde le dernier mot (7-6, 3-6, 6-4). Le coup est difficile à encaisser pour Halep, qui en plus de perdre sa troisième finale de suite, cède sa place de n°1 mondiale. «Mentalement, j’étais prête. Mais physiquement, j’étais à bout», avoue-t-elle.

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“C’EST MON GRAND CHELEM PRÉFÉRÉ [ROLAND-GARROS] : SI JE DEVAIS EN GAGNER UN, C’ÉTAIT CELUI-LÀ.”

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LE DÉCLIC À ROLAND-GARROS

«Ces trois finales m’ont simplement appris qu’une finale était juste un autre match, que ça n’avait rien de spécial. Je suis un peu différente. Un peu plus détendue. Mais on ne sait jamais, chaque match est différent et je ne peux rien attendre de spécifique. Je ne sais pas ce que je vais changer, sûrement rien, parce que je vais garder ma routine. Maintenant, j’ai plus d’expérience. Je me sens plus calme. Lors des deux jours avant la finale, je vais me reposer, me relaxer, et ensuite on verra ce qu’il se passera. Je vais certainement me battre sur chaque balle. J’ai perdu trois fois jusqu’à maintenant en finale, personne n’est mort, donc si je perds, ça n’est pas grave. Mais je serai plus confiante, parce que j’ai beaucoup d’expérience», déclare Simona Halep avant son duel contre l’Américaine Sloane Stephens.

Sa quatrième tentative s’avère la bonne même si Halep, menée 6/4 et 3/0 est passée à deux jeux de la défaite (victoire 3/6, 6/4, 6/1) : «J’ai rêvé de ce moment dès que j’ai commencé à jouer au tennis. Je suis tellement contente que cela arrive à Roland-Garros, à Paris. C’est un moment incroyable. J’avais déjà gagné Roland-Garros chez les juniors et je m’étais toujours promis de le gagner de nouveau chez les grandes. C’est mon Grand Chelem préféré : si je devais en gagner un, c’était celui-là. C’est irréel. Je pense à tous les coaches, tous ceux avec qui j’ai travaillé pendant vingt ans, ma famille, mes amis. Sans eux, je n’aurai pas pu revenir après avoir perdu trois finales. Maintenant, je veux oublier tout ça et profiter du moment». 

Avant de livrer son analyse tactique : «Dans le 2e set, j’ai simplement arrêté de tout rater. Je commettais beaucoup trop de fautes directes en début de match. La balle rebondissait très haut, je n’arrivais à rien faire. Je n’arrivais pas à m’ouvrir le court, ni même à la mettre dedans. Mais l’an passé, j ‘étais dans le mauvais rôle : j’avais un set et un break d’avance, j’ai été trop défensive, et j’ai perdu le match. Il fallait donc que je me montre patiente. Par la suite, Stephens s’est fatiguée. Et quand j’ai réussi ce point au filet (à 3-0 dans le 3e), sans doute le plus important du set, je me suis dit : c’est bon, c’est pour moi, c’est mon tour. Mais dans le dernier jeu, je reconnais que j’avais du mal à respirer… Avant la finale, Darren m’a dit : m’a dit : tu vas la gagner. Tu vas rentrer sur le court et penser que tu dois la gagner, n’attends pas que ton adversaire te l’offre. Il m’a mis un peu de pression. Mais c’est aussi peut-être grâce à ça que j’ai gagné».

SA SAISON 2018

Malgré l’accroc à l’US Open, Halep a donc remporté trois titres (Shenzen, Roland-Garros et Montréal) et disputé trois finales (Open d’Australie, Rome, Cincinnati) mais également atteint les demies à Doha ou Indian Wells. C’est cette régularité sur la saison (et l’absence de Serena Williams) qui lui a permis de redevenir n°1 mondiale le 26 février dernier. Un rang qu’elle occupe donc depuis six mois.

HENIN ET NADAL, LES MODÈLES

L’un de ses premiers modèles fut la Belge Justine Henin, quadruple vainqueur de Roland-Garros. Une admiration qui s’explique par leur gabarit léger : 1,67m pour Henin et 1,68 m pour Halep. «Justine Henin était mon idole de jeunesse, confirme Simona Halep. Je l’aimais beaucoup, j’aimais son jeu, sa personnalité sur le court». Face à des joueuses plus puissantes qu’elles, même si la Roumaine est moins offensive que la Belge, Halep s’est inspirée de Henin, qui parvenait le plus souvent à trouver une solution tactique. Si Simona a toujours admiré Federer et son compatriote Andrei Pavel, sur les conseils de Darren Cahill, ces 18 derniers mois, elle s’est servie de l’approche mentale de Rafael Nadal. «Pour être honnête, on s’inspire énormément de Nadal, des batailles qu’il a menées, comme lors de la finale de l’Open d’Australie face à Stan Wawrinka durant laquelle il se blesse, a confirmé l’Australien après la victoire de sa protégée à Roland-Garros. Rafa l’inspire dans tout ce qu’il a pu faire et fait encore, la façon dont il s’entraîne, sa régularité dans le travail, la manière dont il se bat dans chaque match, peu importe le score. Il peut être mené 6/0, 5/0, 40/0, son attitude reste la même. Selon moi, c’est ce que Simona fait depuis un an et demi. Personne ne sera comme Rafa. Il y a toujours l’ancienne Simona dans la nouvelle Simona, et elle est devenue vraiment comme ça, même si elle a toujours eu un gros sens du travail. Je n’ai jamais eu à la pousser sur le court. Elle se donne toujours à 100%. Elle est une mini-Rafa à l’entraînement. Il faut aussi qu’on arrive à la faire devenir une mini-Rafa dans les matchs».

QUAND CAHILL PROVOQUE UNE PRISE DE CONSCIENCE

En mars 2017 au tournoi de Miami, opposée à Johanna Konta en quarts de finale, Halep demande à Cahill de la rejoindre sur sa chaise alors que l’Anglaise a quitté le court. Tout juste remise d’une blessure au genou, elle se montre insuffisamment réceptive quand son coach lui demande de se relaxer et de saisir les opportunités. La rencontre se solde par une défaite (3/6, 7/6, 6/2) et l’Australien claque la porte. Un choc pour Halep : «En fait, il ne se plaignait jamais de mon jeu et de ce que je faisais à l’entraînement, car je travaille dur. Mais il n’aimait pas mon attitude. Et je savais que, pour qu’il revienne à moi, je devais changer cette attitude. J’ai modifié mon comportement immédiatement en essayant d’être plus positive. Cela avait été un choc pour moi, mais j’ai dû accepter de changer des choses dans mon attitude», admet-elle, convenant en avoir tiré «une belle leçon. Pas seulement pour le tennis, mais pour ma vie». Cahill ne donne plus signe de vie mais la regarde évoluer et décide de revenir quelques mois plus tard, avant Roland-Garros 2017 : «C’était dur mais nécessaire. Je n’aurais pas rendu service à Simona en lui tapant dans le dos et en lui disant : on se retrouve la semaine prochaine. Même si ça pouvait me faire perdre mon boulot. Mais pour elle à long terme, c’était bénéfique car elle est revenue sur le court avec un meilleur état d’esprit». Ensemble, le duo accède à la place de n°1 mondiale le 9 octobre 2017 à l’issue du tournoi de Pékin.

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“CASTORRI A AIDÉ SIMONA À NE PAS ÉLUDER LES QUESTIONS DIFFICILES MAIS À LES AFFRONTER, LE FAIT D’AVOUER SES FAIBLESSES, D’EN PARLER, ÉTANT DÉJÀ UN SIGNE DE FORCE.” 

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UNE AIDE PSYCHOLOGIQUE BIENVENUE

Sur les conseils de son coach, Halep a également travaillé avec une psychologue du sport basée en Floride : Alexis Castorri. Dès 1985, cette dernière avait aidé Ivan Lendl à mieux gérer la pression, notamment grâce à des exercices de yoga et d’aérobic. Sept mois plus tard, le Tchèque remporte l’US Open contre McEnroe dans un match qu’il considère comme son plus abouti. Castorri a également accompagné Andy Murray dans sa quête d’un titre majeur, alors que l’Ecossais semblait faire un petit blocage, ou plus récemment le Sud-Africain Kevin Anderson à ne plus faire de complexes face aux stars du circuit (finale à l’US Open 2017 et à Wimbledon 2018). «Castorri a aidé Simona à ne pas éluder les questions difficiles mais à les affronter, le fait d’avouer ses faiblesses, d’en parler, étant déjà un signe de force à une époque où les joueurs et joueuses sont scrutés, épiés, où ils ont toute une équipe derrière eux. Savoir gérer cette pression est capital et Simona a su apprendre à le faire, notamment grâce au travail d’Alexis Castorri», analyse Darren Cahill.

CAHILL ET RUZICI, LES DEUX PILIERS

Devenu son coach à plein-temps en 2016, Darren Cahill lui apporte son expérience puisqu’il a auparavant mené Lleyton Hewitt à la 1ere place mondiale et travaillé avec André Agassi. À la fois relax et exigeant, l’Australien a su obtenir le meilleur de sa joueuse. «Nous avons bien sûr eu quelques clashs durant cette période, certains que tout le monde a pu voir, d’autres plus discrets, mais ils ont fait partie d’un processus d’apprentissage, qui a permis à Simona de prendre les remarques de la bonne façon, pour devenir une joueuse plus mûre», estime l’ancien 22e joueur mondial, demi-finaliste de l’US Open 1988. L’autre mentor d’Halep se nomme Virginia Ruzici. L’ancienne joueuse roumaine, titrée lors de Roland-Garros 1978, est devenue son agent. Elle lui a transmis son expérience, l’a convaincue de progresser en anglais et lui a donné les codes pour évoluer sur le circuit. 

UN JEU EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION

Si Halep s’est toujours appuyée sur son déplacement, grâce à un jeu de jambes ultra-précis et un grand sens de l’anticipation, et sur sa régularité ou son coup droit, son jeu n’a cessé de progresser au fil des années. «C’est son jeu de jambes et son replacement vers l’avant qui m’avaient déjà interpellée il y a six ans quand je l’avais vue remporter le tournoi juniors, soulignait Virginia Ruzici dès 2014. Son déplacement est extraordinaire, il se fait sans effort. Simona est une athlète naturelle, avec une couverture de terrain presque parfaite. À la base, elle semblait une joueuse de défense mais elle est devenue beaucoup plus agressive avec la confiance. Désormais, je le classerais plutôt parmi les joueuses de contre-attaque. Je trouve sa technique très propre, son revers, long de ligne ou croisé, me fait penser à celui de Djokovic. Son coup droit est également très propre. Elle sait tout faire. Avec le temps, il faudrait juste qu’elle aille un peu plus vers l’avant car elle capable de volleyer, d’utiliser l’amortie, le slice». Puis en 2015, toujours avant Roland-Garros : «Même si elle a grandi sur dur, Simona est une joueuse de terre battue naturelle. Sur cette surface, elle se déplace mieux que toutes les autres, avec des glissades parfaites. Et en plus, elle propose un tennis très varié, en opposition avec le tennis de Maria ou de Serena. Un an plus tard, elle joue mieux, plus à l’intérieur du court, elle coupe très bien les trajectoires, elle retourne mieux, de façon bien plus agressive. Elle a aussi beaucoup progressé au service, ce qui ne veut pas dire qu’on ne verra pas une double-faute par ci par là, mais globalement son service est plus solide, autant en première balle qu’en deuxième».

UNE VÉRITABLE STAR EN ROUMANIE

À un moment où le football roumain marque le pas, Simona Halep est la sportive n°1 en Roumanie. L’ancienne gymnaste Nadia Comaneci, qui vit aux Etats-Unis, a d’ailleurs sauté dans un avion pour voir sa finale à Roland-Garros. Un match auquel Gheorghe Hagi (ancien joueur du Real Madrid et de Barcelone au pied gauche de velours) a également assisté. Après son sacre à Roland-Garros, Halep a présenté son trophée devant 15 000 fans en folie au stade national de Bucarest. La poste roumaine a même créé un timbre à son effigie.

ENFANCE

Native de Constan?a, sur les rives occidentales de la mer Noire, Simona Halep est la fille de Stere, un joueur de football amateur, propriétaire d’une usine de produits laitiers, Tania sa maman ne travaillant pas. Elle débute le tennis très tôt, à l’âge de quatre ans pour imiter son frère aîné Nicolae, s’entraîne quotidiennement à six ans et décide de devenir professionnelle dès 14 ans. Pour y parvenir, elle part pour Bucarest à 16 ans.

PREMIERS COUPS D’ÉCLAT

Dès 2008, elle remporte Roland-Garros juniors, dominant sa compatriote Elena Bogdan en finale. En 2009, à 17 ans, elle décide de subir une réduction mammaire : «À l’époque, je l’ai fait pour le tennis. Peut-être que ça m’a permis d’arriver aujourd’hui à la première place mondiale. Je me sens beaucoup mieux, peu importe ce que pensent les gens. Ma poitrine me gênait, surtout au service. Elle était si lourde que j’avais souvent des douleurs dans le dos». Aujourd’hui, Simona ne veut plus en entendre parler. Le premier déclic sur le circuit principal a lieu en mars 2013 à Rome, la Roumaine sort des «qualifs» puis s’offre Radwanska (n°4 mondiale), Vinci (15e), Kuznetsova (37e WTA) et Jelena Jankovic (18e), avant de chuter en demies devant Serena Williams. Cette saison-là, Halep remporte six titres, se hissant à la 11e place en fin d’année. La machine est lancée.

TROIS FINALES DE GRAND CHELEM, TROIS DÉFAITES 

Ces trois «échecs» ont donné à Halep la réputation d’une joueuse qui flanche dans le «money time». Une étiquette pas forcément justifiée si l’on analyse le déroulement de ces trois rencontres. Lors de Roland-Garros 2014, elle cède face à Maria Sharapova qui compte déjà quatre tournois du Grand Chelem à son actif (6-4, 6-7, 6-4 en 3h02), après avoir tout donné. Plus expérimentée, la Russe explique alors qu’il s’agit «de la finale la plus difficile » de sa carrière. Halep, qui a réussi le debreak au 3e set, est passée en 12 mois de la 57e à la 3e place mondiale.

En 2017, toujours à Roland-Garros, la Roumaine part cette fois grande favorite. Menant 6/4, 3/0 devant Jelena Ostapenko, elle finit par s’incliner sur le passage de l’ouragan letton (4-6, 6-4, 6-3). Sans doute un peu trop passive, Halep a également subi la puissance et l’insouciance de son adversaire (20 ans, aucun titre sur le circuit) qui s’est mise à tout lâcher… et à tout rentrer, réussissant 54 points gagnants durant la partie.

En début d’année 2018 à l’Open d’Australie, c’est la Roumaine qui a failli réussir un incroyable come-back : menée un set à zéro, au bord des crampes (elle sera même hospitalisée pour déshydratation après le match), Halep a cru renverser la vapeur contre Caroline Wozniacki. Mais la Danoise, au bénéfice d’une défense héroïque dans la troisième manche, garde le dernier mot (7-6, 3-6, 6-4). Le coup est difficile à encaisser pour Halep, qui en plus de perdre sa troisième finale de suite, cède sa place de n°1 mondiale. «Mentalement, j’étais prête. Mais physiquement, j’étais à bout», avoue-t-elle.

LE DÉCLIC À ROLAND-GARROS

«Ces trois finales m’ont simplement appris qu’une finale était juste un autre match, que ça n’avait rien de spécial. Je suis un peu différente. Un peu plus détendue. Mais on ne sait jamais, chaque match est différent et je ne peux rien attendre de spécifique. Je ne sais pas ce que je vais changer, sûrement rien, parce que je vais garder ma routine. Maintenant, j’ai plus d’expérience. Je me sens plus calme. Lors des deux jours avant la finale, je vais me reposer, me relaxer, et ensuite on verra ce qu’il se passera. Je vais certainement me battre sur chaque balle. J’ai perdu trois fois jusqu’à maintenant en finale, personne n’est mort, donc si je perds, ça n’est pas grave. Mais je serai plus confiante, parce que j’ai beaucoup d’expérience», déclare Simona Halep avant son duel contre l’Américaine Sloane Stephens.

Sa quatrième tentative s’avère la bonne même si Halep, menée 6/4 et 3/0 est passée à deux jeux de la défaite (victoire 3/6, 6/4, 6/1) : «J’ai rêvé de ce moment dès que j’ai commencé à jouer au tennis. Je suis tellement contente que cela arrive à Roland-Garros, à Paris. C’est un moment incroyable. J’avais déjà gagné Roland-Garros chez les juniors et je m’étais toujours promis de le gagner de nouveau chez les grandes. C’est mon Grand Chelem préféré : si je devais en gagner un, c’était celui-là. C’est irréel. Je pense à tous les coaches, tous ceux avec qui j’ai travaillé pendant vingt ans, ma famille, mes amis. Sans eux, je n’aurai pas pu revenir après avoir perdu trois finales. Maintenant, je veux oublier tout ça et profiter du moment». 

Avant de livrer son analyse tactique : «Dans le 2e set, j’ai simplement arrêté de tout rater. Je commettais beaucoup trop de fautes directes en début de match. La balle rebondissait très haut, je n’arrivais à rien faire. Je n’arrivais pas à m’ouvrir le court, ni même à la mettre dedans. Mais l’an passé, j ‘étais dans le mauvais rôle : j’avais un set et un break d’avance, j’ai été trop défensive, et j’ai perdu le match. Il fallait donc que je me montre patiente. Par la suite, Stephens s’est fatiguée. Et quand j’ai réussi ce point au filet (à 3-0 dans le 3e), sans doute le plus important du set, je me suis dit : c’est bon, c’est pour moi, c’est mon tour. Mais dans le dernier jeu, je reconnais que j’avais du mal à respirer… Avant la finale, Darren m’a dit : m’a dit : tu vas la gagner. Tu vas rentrer sur le court et penser que tu dois la gagner, n’attends pas que ton adversaire te l’offre. Il m’a mis un peu de pression. Mais c’est aussi peut-être grâce à ça que j’ai gagné».

SA SAISON 2018

Malgré l’accroc à l’US Open, Halep a donc remporté trois titres (Shenzen, Roland-Garros et Montréal) et disputé trois finales (Open d’Australie, Rome, Cincinnati) mais également atteint les demies à Doha ou Indian Wells. C’est cette régularité sur la saison (et l’absence de Serena Williams) qui lui a permis de redevenir n°1 mondiale le 26 février dernier. Un rang qu’elle occupe donc depuis six mois.

HENIN ET NADAL, LES MODÈLES

L’un de ses premiers modèles fut la Belge Justine Henin, quadruple vainqueur de Roland-Garros. Une admiration qui s’explique par leur gabarit léger : 1,67m pour Henin et 1,68 m pour Halep. «Justine Henin était mon idole de jeunesse, confirme Simona Halep. Je l’aimais beaucoup, j’aimais son jeu, sa personnalité sur le court». Face à des joueuses plus puissantes qu’elles, même si la Roumaine est moins offensive que la Belge, Halep s’est inspirée de Henin, qui parvenait le plus souvent à trouver une solution tactique. Si Simona a toujours admiré Federer et son compatriote Andrei Pavel, sur les conseils de Darren Cahill, ces 18 derniers mois, elle s’est servie de l’approche mentale de Rafael Nadal. «Pour être honnête, on s’inspire énormément de Nadal, des batailles qu’il a menées, comme lors de la finale de l’Open d’Australie face à Stan Wawrinka durant laquelle il se blesse, a confirmé l’Australien après la victoire de sa protégée à Roland-Garros. Rafa l’inspire dans tout ce qu’il a pu faire et fait encore, la façon dont il s’entraîne, sa régularité dans le travail, la manière dont il se bat dans chaque match, peu importe le score. Il peut être mené 6/0, 5/0, 40/0, son attitude reste la même. Selon moi, c’est ce que Simona fait depuis un an et demi. Personne ne sera comme Rafa. Il y a toujours l’ancienne Simona dans la nouvelle Simona, et elle est devenue vraiment comme ça, même si elle a toujours eu un gros sens du travail. Je n’ai jamais eu à la pousser sur le court. Elle se donne toujours à 100%. Elle est une mini-Rafa à l’entraînement. Il faut aussi qu’on arrive à la faire devenir une mini-Rafa dans les matchs».

QUAND CAHILL PROVOQUE UNE PRISE DE CONSCIENCE

En mars 2017 au tournoi de Miami, opposée à Johanna Konta en quarts de finale, Halep demande à Cahill de la rejoindre sur sa chaise alors que l’Anglaise a quitté le court. Tout juste remise d’une blessure au genou, elle se montre insuffisamment réceptive quand son coach lui demande de se relaxer et de saisir les opportunités. La rencontre se solde par une défaite (3/6, 7/6, 6/2) et l’Australien claque la porte. Un choc pour Halep : «En fait, il ne se plaignait jamais de mon jeu et de ce que je faisais à l’entraînement, car je travaille dur. Mais il n’aimait pas mon attitude. Et je savais que, pour qu’il revienne à moi, je devais changer cette attitude. J’ai modifié mon comportement immédiatement en essayant d’être plus positive. Cela avait été un choc pour moi, mais j’ai dû accepter de changer des choses dans mon attitude», admet-elle, convenant en avoir tiré «une belle leçon. Pas seulement pour le tennis, mais pour ma vie». Cahill ne donne plus signe de vie mais la regarde évoluer et décide de revenir quelques mois plus tard, avant Roland-Garros 2017 : «C’était dur mais nécessaire. Je n’aurais pas rendu service à Simona en lui tapant dans le dos et en lui disant : on se retrouve la semaine prochaine. Même si ça pouvait me faire perdre mon boulot. Mais pour elle à long terme, c’était bénéfique car elle est revenue sur le court avec un meilleur état d’esprit». Ensemble, le duo accède à la place de n°1 mondiale le 9 octobre 2017 à l’issue du tournoi de Pékin.

UNE AIDE PSYCHOLOGIQUE BIENVENUE

Sur les conseils de son coach, Halep a également travaillé avec une psychologue du sport basée en Floride : Alexis Castorri. Dès 1985, cette dernière avait aidé Ivan Lendl à mieux gérer la pression, notamment grâce à des exercices de yoga et d’aérobic. Sept mois plus tard, le Tchèque remporte l’US Open contre McEnroe dans un match qu’il considère comme son plus abouti. Castorri a également accompagné Andy Murray dans sa quête d’un titre majeur, alors que l’Ecossais semblait faire un petit blocage, ou plus récemment le Sud-Africain Kevin Anderson à ne plus faire de complexes face aux stars du circuit (finale à l’US Open 2017 et à Wimbledon 2018). «Castorri a aidé Simona à ne pas éluder les questions difficiles mais à les affronter, le fait d’avouer ses faiblesses, d’en parler, étant déjà un signe de force à une époque où les joueurs et joueuses sont scrutés, épiés, où ils ont toute une équipe derrière eux. Savoir gérer cette pression est capital et Simona a su apprendre à le faire, notamment grâce au travail d’Alexis Castorri», analyse Darren Cahill.

CAHILL ET RUZICI, LES DEUX PILIERS

Devenu son coach à plein-temps en 2016, Darren Cahill lui apporte son expérience puisqu’il a auparavant mené Lleyton Hewitt à la 1ere place mondiale et travaillé avec André Agassi. À la fois relax et exigeant, l’Australien a su obtenir le meilleur de sa joueuse. «Nous avons bien sûr eu quelques clashs durant cette période, certains que tout le monde a pu voir, d’autres plus discrets, mais ils ont fait partie d’un processus d’apprentissage, qui a permis à Simona de prendre les remarques de la bonne façon, pour devenir une joueuse plus mûre», estime l’ancien 22e joueur mondial, demi-finaliste de l’US Open 1988. L’autre mentor d’Halep se nomme Virginia Ruzici. L’ancienne joueuse roumaine, titrée lors de Roland-Garros 1978, est devenue son agent. Elle lui a transmis son expérience, l’a convaincue de progresser en anglais et lui a donné les codes pour évoluer sur le circuit. 

UN JEU EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION

Si Halep s’est toujours appuyée sur son déplacement, grâce à un jeu de jambes ultra-précis et un grand sens de l’anticipation, et sur sa régularité ou son coup droit, son jeu n’a cessé de progresser au fil des années. «C’est son jeu de jambes et son replacement vers l’avant qui m’avaient déjà interpellée il y a six ans quand je l’avais vue remporter le tournoi juniors, soulignait Virginia Ruzici dès 2014. Son déplacement est extraordinaire, il se fait sans effort. Simona est une athlète naturelle, avec une couverture de terrain presque parfaite. À la base, elle semblait une joueuse de défense mais elle est devenue beaucoup plus agressive avec la confiance. Désormais, je le classerais plutôt parmi les joueuses de contre-attaque. Je trouve sa technique très propre, son revers, long de ligne ou croisé, me fait penser à celui de Djokovic. Son coup droit est également très propre. Elle sait tout faire. Avec le temps, il faudrait juste qu’elle aille un peu plus vers l’avant car elle capable de volleyer, d’utiliser l’amortie, le slice». Puis en 2015, toujours avant Roland-Garros : «Même si elle a grandi sur dur, Simona est une joueuse de terre battue naturelle. Sur cette surface, elle se déplace mieux que toutes les autres, avec des glissades parfaites. Et en plus, elle propose un tennis très varié, en opposition avec le tennis de Maria ou de Serena. Un an plus tard, elle joue mieux, plus à l’intérieur du court, elle coupe très bien les trajectoires, elle retourne mieux, de façon bien plus agressive. Elle a aussi beaucoup progressé au service, ce qui ne veut pas dire qu’on ne verra pas une double-faute par ci par là, mais globalement son service est plus solide, autant en première balle qu’en deuxième».

UNE VÉRITABLE STAR EN ROUMANIE

À un moment où le football roumain marque le pas, Simona Halep est la sportive n°1 en Roumanie. L’ancienne gymnaste Nadia Comaneci, qui vit aux Etats-Unis, a d’ailleurs sauté dans un avion pour voir sa finale à Roland-Garros. Un match auquel Gheorghe Hagi (ancien joueur du Real Madrid et de Barcelone au pied gauche de velours) a également assisté. Après son sacre à Roland-Garros, Halep a présenté son trophée devant 15 000 fans en folie au stade national de Bucarest. La poste roumaine a même créé un timbre à son effigie.